Le club

J’ai commencé à pratiquer le Taekwondo en 1987, ce fut la rencontre entre un maitre et son élève.
Entre moi jeune débutant et Maitre Lee Kwan Young pionnier du Taekwondo en France.
Je me souviens de mon premier stage dans l’Essonne, je pense qu’il s’agissait de la ville de Brétigny.
C’était extrêmement difficile, en plus des pompes sur les poings, il fallait tenir la cadence et les moments de répits étaient plutôt courts.
Aussi lorsque pour les ceintures blanches le moment fut de s’asseoir, j’étais éreinté et je continuais à admirer les ceintures noires qui effectuèrent des « Poomsae » puis des combats.
Ce stage fut décisif dans ce qui allait devenir bientôt la passion de toute une vie.
Je me souviens de mon premier passage de grade qui s’était déroulé dans le club de Maitre Lee Kwan Young dans le quartier République à Paris.
Nous étions tellement nombreux que nous étions obligés d’attendre dans les escaliers !
Enfin vint mon tour avec trois autres camarades.
Devant nous le jury que présidait Maitre Lee Kwan Young assisté de ses élèves ceintures noires.
A peine le passage de grade débuta il dit : « deux briques »
Nous nous sommes retrouvés à effectuer des pompes en posant nos poings sur les deux briques misent à notre disposition.
Je passais avec brio du grade de ceinture blanche 10 ème Keup à ceinture bleue sixième Keup.
Ainsi débuta ma carrière dans la joie et la souffrance.
Nous faisions deux passages de grades par an, plus je progressais et plus la difficulté s’accroissait.
Je me souviens encore d’un passage de grade cette fois-ci dans son nouveau club situé à Vitry sur Seine.
Arrive l’épreuve des combats, je vois revenir un camarade avec un peu de sang sur le visage.
En voyant cette scène un autre camarade qui attendait d’effectuer son combat, prétexta qu’il devait absolument téléphoner à sa femme ?
Je ne l’ai plus jamais revu !
Effectivement les combats étaient rudes avec comme unique protection la coquille génitale.
C’est cette rudesse mais aussi la volonté de me forger un mental qui me poussa à continuer et à progresser.

Lors des entrainements et des stages Maitre Lee Kwan Young utilisait un bâton en bambou et il testait notre capacité à endurer en nous assénant des coups sur les fesses.
Je n’ai jamais considérer cette pratique comme une humiliation mais comme un encouragement à me dépasser.
Sans le savoir, naissait en moi une volonté de transmettre cet enseignement hors norme.
Aussi une fois devenu ceinture noire premier Dan j’ai assuré la relève du club de Villepreux dans les Yvelines.
La salle était spartiate et je reproduisais à l’identique les cours que j’avais connu avec Mon Maitre.
J’ai formé à Villepreux plusieurs ceintures noires et j’ai aidé l’un de mes élèves à ouvrir son propre club à Poissy.
C’était l’époque ou le Taekwondo était en pleine croissance, le succès revenait aussi à Maitre Lee Kwan Young qui était déjà une légende.
Après Villepreux j’ai succédé à Fréderic Basilio qui enseignait à Voisins le Bretonneux.
Je faisais des cours devant quarante voire cinquante élèves dans la grande salle polyvalente du gymnase des pyramides.
J’ai gravi les Dan non pas de façon boulimique mais avec un immense respect et le sens d’un devoir de transmission.
Lors de mon passage au grade de ceinture noire cinquième Dan devant Maitre Lee Kwan Young celui-ci m’a offert sa propre ceinture acte hautement symbolique puisque j’accédais ainsi après toutes ces années de fidélité et de loyauté au titre de Maitre.
Oui en Taekwondo nous devenons un Maitre à partir de cinquième Dan.
C’est un immense honneur mais aussi une grande responsabilité car il revient au Maitre de guider ses élèves et de les initier à cette valeur que nous appelons le « Do »
Chaque jour qui passe j’essaye d’approfondir cette notion qui peut paraitre abstraite au débutant.
Comment éveiller sa conscience sur l’essence même du Taekwondo?
Alors je revisite les phrases de mon maitre et notamment celle-ci: « Le Taekwondo est une maison qui a plusieurs étages, nous avons les Kibonn (les bases), nous avons les Poomsae, nous avons Hann Bonn Kilougui (attaque défense) nous avons la casse, (planche ou tuiles) mais la finalité c’est le combat.
De plus la compréhension est l’application du « DO » dans le Dojang (salle d’entrainement) et également dans la vie de tout les jours.
Aujourd’hui j’ai le grade de ceinture noire sixième Dan, j’enseigne dans mon propre club qui porte mon nom.

Le Taekwondo reste un art martial malgré qu’il soit devenu également une discipline Olympique.
Cette année je vais fêter mes trente cinq ans de pratique et je continue non seulement à m’entraîner, mais aussi à décortiquer le « DO »
Avant d’accomplir votre premier pas posez vous cette question fondamentale : est ce l’élève qui choisit le Maitre ou l’inverse ?


Ainsi est le TAEKWONDO TRADITIONNEL

Maitre Patrice GICQUEL